Ah si on pouvait "AUDIARD"iser la vie

Nos échanges qutodiens seraient plus amusants...

Audiard, le réinventeur

 

Alors que chacun se cantonne à un registre de langue correspondant à son milieu et soumis  à quelques timides variations selon les circonstances (entretien d'embauche / diner de famille), Michel Audiard a osé utiliser tous les registres en même temps : gouaille, crudité, style littéraire,  érudit...

 Parler, chose banale et quotidienne, devenait avec Audiard un feu d'artifice. Fini les chapelets de mots en kit. Chaque mot surgissant était inattendu !

 

Voici quelques dialogues, pour le plaisir :

 


 

-Avec ton prédécesseur, nous mozardions, nous ravelisions...

-Ah j'te vois d'ici hein ! Le séduire aux arpèges, le liquéfier aux doubles croches, le mystifier aux bémols ! Ça m'étonne pas de ce petit con !

dans "Elle cause plus... Elle flingue"

(extrait vidéo)

-J'aime autant vous dire que pour moi, Monsieur Eric, avec ses costumes tissés en Écosse à Roubaix, ses boutons de manchette en simili et ses pompes à l'italienne fabriquées à Grenoble, eh ben, c'est rien qu'un demi-sel. Et là je parle juste présentation, parce que si je voulais me lancer dans la psychanalyse, j'ajouterais que c'est le roi des cons.

Dans le cave se rebiffe

(extrait vidéo)

-Nous ne sommes pas des voleurs.

-Ah bon ? Alors c'est quoi que vous faites ?

-De la mendicité à main armée.

dans "Bons baisers à lundi"

(extrait vidéo)

Quand on a cravaté Jo les grands pieds, t'as fait un beau rapport, t'as toujours été fort en rédac. Mais tous les deux, on lui doit quelque chose aux grands pieds ! Toi de l'avancement et moi, six mois à l'hosto. Mais ce matin, j'étais bon pour la médaille posthume, alors tu m'excuseras si j'ai quitté la piste.

 

(...)

 

-Je pense que quand on mettra les cons sur orbite, t'as pas fini de tourner.

Dans le pacha

(extrait vidéo)

 

-Entre nous Dabe, une supposition, hein, je dis une supposition que j'aie un graveur, du papier et que j'imprime pour un million de biffetons. En admettant, toujours une supposition qu'on soit 5 sur l'affaire, ça rapporterait net combien à chacun ?

-Vingt ans de placard. Les bénéfices ça se divise, la réclusion ça s’additionne.

Dans le cave se rebiffe

(extrait vidéo)

 

-On ne me retirera pas de la tête que le boulot c'est une habitude, faut la prendre.

-C'est comme si tu disais que la vérole est une habitude sous prétexte qu'il y en a qui l'attrapent.

-Je te cause boulot, tu me réponds maladie, tu comprends... A part ça t'es de bonne foi.

-Permets-moi de te dire que si moi je suis de mauvaise foi quand toi tu viens défendre le boulot t'envoies un peu loin le paradoxe.

-Je préfère pas te répondre. Tu me fatigues.

-C'est le mot paradoxe qui t'emmerde parce que tu sais pas ce que ça veut dire, la v'la la vérité.

Dans Archimède le clochard

 

-Ton client là, ton espagnol ,12 verres cassés, ça te dit rien ?

-Dis-donc toi, primo ça fait 15 ans que je t'interdis de me parler puis deuzio si tu voulais pas qu'il boive, t'avais qu'à pas le servir.

-Alors là Monsieur, grand I, je rétorque que primo je l'ai viré, deuzio des ivrognes y en a assez dans le pays sans que tu les fasses venir de Paris.

-Un ivrogne ?

-Ah ben un peu oui ! Même que le père Bardasse qui boit 15 pastis par jour il en revenait pas !

-Ah parce que tu mélanges tout ça toi ! Mon espagnol comme tu dis et le père Bardasse. Ah... Les grands ducs et les bois sans soif. Les princes de la cuite, les Seigneurs, ceux avec qui tu buvais le coup dans le temps mais qu'ont toujours fait verre à part. Dis toi bien que tes clients et toi ils vous laissent à vos putasseries les Seigneurs. Ils sont à 100 000 verres de toi, eux, ils tutoient les anges.

-Oui mais nous-autres, on est encore capables de tenir le litre sans se prendre pour Dieu le père.

-Mais c'est bien ce que je vous reproche : vous avez le vin petit et la cuite mesquine, dans le fond vous méritez pas de boire. Tu te demandes pourquoi il picole l'espagnol ? C'est pour essayer d'oublier les pignoufs comme vous.

Dans un singe en hiver

(extrait vidéo)

-Attention ! J'ai le glaive vengeur et le bras séculier ! L'aigle va fondre sur la vieille buse!

-Un peu chouette comme métaphore ça, non ?

-C'est pas une métaphore c'est une périphrase.

-Fais pas chier !

-Ça, c'est une métaphore

Dans "Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages"

Deux intellectuels assis vont moins loin qu'une brute qui marche

dans "un taxi pour Tobrouk"

 

-Ne serait-ce qu'à cause de ton vocabulaire, tu ne connaitras jamais l'atroce volupté des grands chagrins d'amour... mais tout le monde n'a pas la stature d'un tragédien... Contente toi du bonheur, la consolation des médiocres.

-Tu as raison de me remettre à ma place Camille. Tu es fait pour les alexandrins et la pourpre, moi pour les shampouineuses et les pinces à vélo.

Dans "l'incorrigible"

 

Confidences extraites du livre Audiard par Audiard :

"C'est drôle l'argot, Céline a fait basculer toute la littérature à cause de l'argot. Mais moi je ne l'emploie jamais, j'emploie des expressions populaires mais pas d'argot. Oui, dans Le cave se rebiffe, il y avait de l'argot, mais un argot complètement inventé. Si les gens du milieu parlaient comme j'écris, ils ne se comprendraient pas entre eux."

"Les gens sont à côté de la plaque. Je déteste l'argot, c'est une convention littéraire, un jargon artificiel de tartarins et de matamores. Moi, je trace en langage populaire, c'est différent."

 

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