Habits : Tous des clones ? Ou pas...

 

L'homme, ce cher bipède, souffre d'une défaillance qui est une aubaine : il n'a ni fourrure ni plumage imposés d'emblée.

 

C'est l'opportunité de se concocter le pelage de son choix et de le réinventer chaque jour au gré de ses fantaisies.

D'ailleurs, aujourd'hui l'offre de vêtements, de tissus et de haillons (aussi) lui permet d'accéder à une palette très large d'accoutrements...

 

Comme il pourrait en profiter ! Il pourrait se "déguiser" tous les jours ingénument, faire de sa vie textile une œuvre d'art. Il pourrait surprendre son prochain, chaque matin, rien qu'en marchant dans la rue accoutré comme il l'entend...

Mais c'est compter sans la convention qui l'empêche de profiter de sa condition en long en large et en travers, qui le brime et l'empêche de se "décorer" comme il le souhaiterait.

 Il ne doit pas s'écarter des modèles, sous peine d'être moqué :

-"TU N'AS AUCUN STYLE"

Est-ce un reproche ? Cette remarque devrait lui faire plaisir car qu'est-ce qu'un "style" sinon une façon d'assembler des vêtements selon une combinaison déjà vue.

Avoir un style est une imitation vestimentaire qui affilie à un "groupe" et permet d'être rangé dans une catégorie.

 

Personne  (quasi) n'échappe à cette affiliation même lorsqu'il cherche à se démarquer.

C'est ce que montre le travail d'Ari Versluis (collectif Exactitudes. ) qui, depuis quasi 20 ans, parcoure les rues du monde pour prendre en photos les gens et en dégager des "tribus vestimentaires".

 

Cela vient sans-doute d'une paresse, de l'envie d'être accepté, d'un réflexe mimétique... Mais les conséquences sont là : les animaux imberbes que sont les humains se servent des habits pour se compartimenter, être socialement "lisibles" et entrer dans une catégorie. Et surtout, ils censurent leurs coups de folie textiles !

 

Si seulement l'homme pouvait considérer un habit comme un bout de tissu et pas comme une carte de membre.

Si seulement la matière colorée reprenait le pouvoir sur la matière grise !

 

 

 

Une femme à la peau beige et aux cheveux roux s'habillerait ainsi parce que le orange lui va bien

 

 

Un homme quelque soit son âge, "son origine" (que veut dire ce mot d'ailleurs, quelle origine à part le cosmos ou un utérus ?) pourrait vêtir ce costume sans que cela signifie qu'il est impérialiste, passéiste mais juste parce qu'il aime le contraste graphique des couleurs et la forme du chapeau...

 

Et à défaut d'excentricité totale, si les deux groupes qui suivent pouvaient intervertir leurs vêtements ou en mixer les codes... Ce serait déjà intéressant !

Chacun cesserait de se mettre en "boite", d'être la caricature de son groupe... Les pistes seraient brouillées

Ce serait... l'incohérence contre l’intolérance !

 

Et si on essayait ? Rien qu'un petit peu, car c'est évidemment très difficile de se libérer de ce carcan qui nous enserre (et nous ennuie).

Un tout petit exercice tout simple :

la prochaine fois que vous allez dans les magasins, essayez sélectionner un vêtement selon d'autres critères que le "style" qu'il incarne. En le choisissant par exemple pour :

  • sa couleur
  • sa sensation au toucher
  • le fait que personne de votre entourage ou de votre milieu ne porterait ça...
  • au hasard
  • parce que vous trouvez cela beau, comme on trouve beau un paon ou un monument au-delà de tout critère de style.
  • l'humour et le second degré de l'habit

etc...

 

à vous d'inventer d'autres critères de choix à nous faire partager !