L'Aire 38, lieu de tous les possibles

 

Un immense hangar avec des caravanes bariolées,

un bateau, des décors et des meubles incroyables : l'Aire 38 , à Nantes est habitée par une fougue et une créativité folles.

Ici se croisent artistes, gens du quartier, universitaires, entreprises, Roms, collectivités, etc.

 

Dans ce laboratoire d'intelligence collective, des êtres qui ne se rencontreraient pas ailleurs se questionnent ensemble et imaginent le monde de demain : solidaire, poétique et pragmatique.


Toutes les caravanes que vous verrez sur les photos sortent régulièrement du hangar. Par leur aspect curieux et poétique, elles éveillent la curiosité des passants et leur arrachent un sourire. Parfois postées dans les quartiers populaires, parmi des caravanes roms ou ailleurs encore, elles abritent chacune une installation : bibliothèque, petite salle de cinéma, scène de spectacle, etc.



INTERVIEW DE GAËTAN BOURDIN, directeur de LBA (Les Badauds Associés)/ L'Aire 38


 

Est-ce que vous diriez que les sujets sérieux peuvent être traités avec légèreté ?

 

GB : Prenons l'exemple du clown : son rôle est de dire des choses abominables sans désespérer les gens. Il met les pieds dans le plat, aborde les questions épineuses mais en passant par l'imaginaire et la poésie. Au final, c'est tout ce qu'il y a de plus sérieux ! Percevoir le réel dans sa globalité, c'est y intégrer la part d'imaginaire et de poésie qui fait aussi partie de ce "réel".


 

Est-ce que l'Aire 38 est d'abord un lieu d'artistes ?

 

GB : Non. Tout ce qu'on trouve ici : les chaises recyclées, les caravanes bricolées, ce sont les contributions des usagers du lieu et ces derniers viennent de tous horizons.

Ici, on est un laboratoire urbain populaire. Personne n'est le maitre du lieu : ni l'industriel, ni l'universitaire, ni la collectivité territoriale ni les artistes ni les Roms, ni les gens du quartier, mais tout le monde à la fois. C'est ça qui permet de recréer du vrai lien.

 

Parfois c'est celui qui n'a pas été à l'école qui a un regard différent. Les propos tenus ici sont nos trésors, c'est eux qui permettent de fabriquer de l'ingéniosité collective

 

 

Certaines entreprises font tester à l'Aire 38 certaines de leurs innovations techniques. Que viennent-elles chercher ici de spécifique ?

 

GB : Ici, on fait de la prospective d'usage. On se demande à quoi sert concrètement telle solution technologique pour l'utilisateur. Est-ce qu'elle va permettre de vivre mieux ? Est-ce qu'elle favorise le vivre ensemble ? Ce sont des questions très concrètes.

Innover pour dire d'innover n'est plus un enjeu.

 

Comment faites-vous pour ne pas devenir une mascotte, pour ne pas cristalliser votre identité et rester toujours prêt à évoluer ?

 

GB : Ici on ne fabrique pas de dogme. On se pose les questions avec ingénuité. On est des badauds, explorateurs dans l'étrangeté du monde qu'on fréquente. Nous sommes profondément convaincus qu'on ne sait rien mais que ça vaut la peine de se poser les questions et cela invite à se remettre en question en permanence.


 

Avez-vous des exemples d'actions menées à l'Aire 38 ?

 

GB :  Ces trois prochaines semaines, trois évènements sont prévus.

L'un "Mémoire à venir" rappelle l'existence de camps d'internement des gens du voyage pendant la seconde guerre mondiale. 

Le second mettra à l'honneur Bea Johnson, star du Zéro déchet puis le 3e consistera en la venue de Carlos Moreno qui parlera de la Smart City.

 

Ce sont des gens qui ne se ressemblent pas a priori et qui ne se croiseraient pas ailleurs mais mon métier c'est l'exercice poétique de la cause commune et on fait d'abord cause commune dans les imaginaires.

Personnellement, quelles sont les rencontres qui vous ont sorti de votre torpeur et vous ont donné envie de tout réinventer ?

 

GB : J'ai travaillé avec des handicapés mentaux et ils m'ont révélé des choses que je ne voyais pas et qui ont enrichi ma perception. J'ai également rencontré des membres d'ONG internationales venant d'autres pays qui incarnaient d'autres façons de voir et de faire très intéressantes. Enfin, il y a eu mon parcours artistique qui m'a amené à considérer que la poésie est indispensable pour vivre sérieusement et de façon complète. Notre partie sensible et notre fragilité sont des forces, pas des faiblesses.

 

 

Merci à Gaëtan Bourdin d'avoir pris de son précieux temps pour répondre à ces questions.

Et bravo à tous ceux qui ont traversé l'Aire 38 et ont apporté leur lumineuse contribution.


Pour prolonger le voyage : le facebook de l'Aire 38